« On joue ici entre les morts on dirait que la mairie attend qu’on meure aussi avant d’aménager un terrain ! » s’exclame Mokhtar, 17 ans, joueur à Ngonmba

Cette phrase, prononcée avec amertume par Mokhtar, jeune passionné de football, résume toute la détresse d’une génération oubliée. Au quartier Ngonmba, au cœur du 9e arrondissement de N’Djamena, les jeunes n’ont pour terrain de football qu’un espace improvisé au milieu de l’ancien cimetière. Des pierres tombales pour spectateurs, des croix pour poteaux. Voilà à quoi ressemble leur quotidien sportif.

Et pourtant, ce quartier n’est pas un désert de talents mais une pépinière. Ngonmba, walia, toukra, ngueli, digangali, kab, gardolé, ndou,…ont vu émerger de grands noms du football tchadien comme Ninga Casimir, Beadoum Armand, Mangana Birwé, Bonaventure Djobelsou…tous formés dans ces mêmes rues. Mais aujourd’hui, leurs héritiers jouent entre les tombes. Et la mairie du 9e arrondissement ? Silence radio.

Un arrondissement aussi vaste et densément peuplé n’a aucun terrain de sport public, rien ; pas une aire de jeu à part un mini terrain appelé Maracana vers ngueli, pas une initiative municipale pour le sport. Rien, si ce n’est l’indifférence. Et dans cette indifférence, la jeunesse se débat, frustrée, délaissée. « Le terrain, on ne l’a pas demandé pour nous amuser, mais pour espérer. Pour fuir la rue, la drogue, les bêtises. La mairie, elle s’en fout », ajoute un autre jeune, les crampons usés, les yeux pleins de colère.

Où sont les élus locaux ? Où est passé le rôle social de la mairie ? Un maire ne doit pas seulement gérer les marchés et les permis de construire. Il doit investir dans la jeunesse, dans l’avenir. Car le sport, c’est de la prévention, de la paix, de la cohésion. Un chef de carré rencontré conclut en ces termes « il est temps que la mairie du 9e arrondissement prenne ses responsabilités. Il est temps d’aménager un terrain digne de ce nom à Ngonmba. Le quartier a assez donné, il mérite un minimum de respect et d’accompagnement. La jeunesse de Ngonmba ne demande pas la lune, elle demande un terrain, un simple terrain pour jouer, rêver, s’exprimer. »

A signaler qu’un agent de la mairie contacté a opposé un refus poli.

 

Gaëlle ELSOU